Christian Lacroix - Histoires de Mode @ Arts Décoratifs

Qu'on s'intéresse ou pas à la "mode", l'exposition des Arts Décoratifs vaut vraiment le détour.

Christian Lacroix nous raconte son histoire de la mode sur deux étages (prévoir deux heures pour tout voir en détail) à travers plusieurs thèmes : le blanc, la couleur, les rayures, les pois, les damiers, écossais & carreaux, les mixages, les fleurs, l'historicisme, la liturgie, l'arlésienne, l'abîmé, l'à l'envers, le graphisme, le caparaçon, le patchwork, l'hispanisme, la texture, l'araignée, l'art du singulier, "au couturier méconnu", l'ailleurs, le noir.

Il prend goût à nous raconter ses anecotes personnelles et pensées intimes, de son enfance à aujourd'hui. A six ans déjà, il se rêvait "costumier" plutôt que couturier. Une précocité de vocation chez cet esprit pas si libre que ça, limite obsessionnel parfois.

En tout cas la passion est là, dans ses mots, dans ses choix : il réalise ici son fantasme d'être conservateur d'un musée.

Etant plutôt inculte dans le domaine de la mode, ce sont surtout les détails qui m'ont plu : la finesse des dentelles, la folie d'un col de chemisier, la délicatesse des soies, l'extravagance des broderies et des couleurs, la sensualité d'un dos nu. On regrette de ne pas pouvoir toucher les matières, s'approcher de plus près... rêve impossible!
L'historien en herbe a aussi de quoi se régaler : on admire des vêtements sortis des collections du musée datant des XVIIe, XVIIIe, XIXe et XXe siècles!!

Voilà de quoi vous mettre l'eau à la bouche j'espère, sinon le reste du musée a l'air de valoir le coup également et mérite bien une deuxième visite (pour profiter de la gratuité des collections permanentes jusqu'à fin juin!).

C'est jusqu'au 20 avril 2008, au 107 rue de Rivoli, et il vous en coûtera 8 € (ou 6,50 € si vous avez moins de 25 ans !).
Ah, et ils font nocturne le jeudi soir jusqu'à 21h :)

Shoji Ueda & Edouard Boubat @ MEP

Il y a de quoi passer de beaux moments actuellement à la MEP : plusieurs expos à voir, surtout les salles sur Shoji Ueda et Edouard Boubat.

***Shoji Ueda pour commencer.***

Trois salles sur l'évolution de son travail, avec ses photos les plus célèbres dans les dunes.
Il fait de ce paysage naturel son studio. Les silhouettes de ses personnages viennent ponctuer l'infini de l'horizon, la pureté de la ligne, comme un sourire surréaliste sur visage malicieux.
La simplicité extrême de ses moyens et de ses compositions est vraiment rafraîchissante...

***Un petit saut à l'expo sur Peter Knapp au même étage.***

Grosse déception. Est-ce le clash avec la simplicité de Ueda qui nous rend hermétique?
Il y a de l'idée, mais la beauté n'est pas là. De la photo plastique, conceptuelle... pas inintéressant mais voilà.

***Edouard Boubat ensuite.***

La plus grosse expo : une rétrospective sur cet immense photographe mérite bien ça.

Surnommé le "correspondant de paix" par Prévert, au moment où la mode est au reportage de guerre (Capa, Cartier-Breson...), Boubat va à contre-courant en suivant son envie.

Photographe voyageur, il parcourt la terre (Chine, Inde, Irak, Etats Unis...) et capture les sourires, les moments heureux, la douceur de vivre.
Pas de niaiserie, juste une grande sérénité et un sentiment de liberté dans ses photographies. Ca fait du bien, vraiment.

***Pour finir, un travail intéressant de Yuri Toroptsov.***

Une série sur le sommeil et les âges de la vie, en parallèle avec la Recherche de Proust.

A signaler pour approfondir, un dialogue Shoji Ueda // Jacques Henri Lartigue à la galerie Camera Obscura jusqu'au 28 mars 2008.

MEP
5/7 rue de Fourcy
75004 Paris
> metro Saint Paul (ligne 1)
plein tarif : 6 € / tarif réduit : 3 € / gratuit le mercredi de 17h à 20h

Camera Obscura
268, boulevard Raspail
75014 Paris
> metro Raspail (lignes 6 & 4)

Saul Leiter @ Fondation Cartier Bresson

La photographie comme des "fragments de souvenirs", comme un "inachevé" irresistible... visions miraculeuses, détails qui accrochent l'oeil, points de vue anecdotiques, cadres insolites.

C'est d'abord dans le noir et blanc, puis dans les couleurs fanées que Saul Leiter saisit les ambiances. Il descend dans la rue, en bas de chez lui, et les situations s'offrent à lui, à condition d'avoir la patience de s'asseoir quelque part, d'observer longuement, de se faire discret.

La discrétion est sa qualité principale, autant dans ses photographies que dans sa carrière : à 85 ans c'est sa première rétrospective en France!
Mais pas n'importe où, dans cet endroit bien caché à Paris qu'est la Fondation Henri Cartier-Bresson, celui-là même qui lui donna l'envie de faire de la photo (à l'instar de toute une génération de photographes...).

C'est jusqu'au 13 avril, ça coûte 3 € pour les moins de 26 ans (6 € plein tarif), ce n'est pas indigeste (3/4 d'h en prenant bien son temps) et il n'y a personne en semaine!

Fondation Henri Cartier-Bresson
2 impasse Lebouis
75014 Paris
> métro Gaîté (ligne 13)

Ernest Pignon-Ernest : un théâtre silencieux dans le bruit de la ville

Grâce à un ami bien informé, j'ai pu assister vendredi soir à une rencontre avec Ernest Pignon-Ernest à la Sorbonne.
Organisé par des étudiants en master d'Histoire de l'Art, la soirée était centrée autour de son travail sur la ville de Naples.

Quelle heureuse coincidence! J'admire depuis longtemps cet artiste et mes prochaines vacances seront justement à Naples cet été!
J'ai été complètement emballée par tout ce que nous avons vu et entendu ce soir-là.
Monsieur Pignon-Ernest, très simple, anime réellement le débat en le ponctuant d'anecdotes et de réflexions sur sa démarche.

Cette idée de cheminement à travers la ville (il colle ses dessins suivant un parcours historique, culturel, sensoriel mûrement réfléchi), sa technique de dessinateur absolument impressionnante (il s'attaque aux grands comme Caravage dans ses "citations"), sa volonté d'inscrire le dessin dans l'espace, le mouvement, l'animation de la ville... Le choix de ses sujets, sa capacité à reconnaître les difficultés qu'il a rencontrées : les quelques fois où il renonce; où il se plante.

Son art est humain, profond, sensible, éphémère. Ses papiers collés "suintent les murs", font corps avec les moindres aspérités de la pierre.
Il n'en reste aujourd'hui plus rien, si ce n'est une Sainte Agathe collée en 1990, perdue quelque part dans le dédale des rues de Naples et jalousement protégée par les habitants du quartier.

Il décrit ainsi son travail :

"Au début il y a un lieu, un lieu de vie, dont j'essaie de saisir à la fois ce qui se voit, les qualités plastiques (l'espace, les couleurs, la lumière) et ce qui ne se voit pas, ne se voit plus : l'histoire, les souvenirs enfouis, la charge symbolique... Et dans ces lieux saisis ainsi dans toute leur complexité je viens inscrire une image qui doit les perturber, les réveler, en réactiver la mémoire, en exacerber la symbolique..."

Il prépare une exposition pour cet été à Avignon, sur le thème de l'extase... Tout un programme... :)

On peut assister à d'autres conférences sur des sujets divers proposés par le master Projets Culturels dans l'Espace Public jusqu'au 28 mars 2008.
Le programme est .